Transnational families and divorce conference

Transnational families and divorce conference – Radboud University Nijmegen

Le 27 et le 28 septembre, j’ai participé à une conférence à l’Université de Radboub à Nijmegen aux Pays-Bas sur le divorce des familles transnationales. Cette conférence fut organisée par Betty de Hart et Asuncion Fresnoza-Flot suite au constat, faite par ces deux chercheures, du nombre limité d’études qui traitent de ce sujet. Leur but était donc de rassembler des chercheur-es de différentes disciplines qui travaillent sur ce sujet dans divers contextes nationaux afin de partager ensemble leurs connaissances et de créer ainsi un réseau dans ce champ scientifique encore peu développé à ce jour.
La conférence s’articulait autour de différents axes ; un axe socio-juridique : comment les couples transnationaux séparés vivent-ils le fait d’être confrontés à différents systèmes juridiques dû au fait qu’ils sont liés à deux pays différents ? Comment ces couples gèrent-ils un divorce religieux tel que le Talak ? Quels sont les processus et les défis importants qui sous-tendent un divorce transnational ; un axe épistémologique : comment peut-on conceptualiser le divorce transnational dans un contexte de mobilité ? Quels sont les défis conceptuels, méthodologiques et éthiques dans l’étude du phénomène des divorces transnationaux ? ; et enfin, un axe social : Quels sont les acteurs et professionnels qui agissent dans le domaine des divorces transnationaux ? Quels types d’informations et d’aide procurent-ils aux couples transnationaux qui divorcent ? Quels rôles spécifiques jouent-ils ? Comment le couple et les autres membres de la famille sont affectés par le divorce ? Comment font-ils encore famille lorsque les parents et les enfants ne vivent plus tous dans le même pays suite au divorce ? Comment les membres de la famille proches réagissent-ils face au divorce ? Quels sont les problèmes économiques, sociaux et émotionnels auxquels font face ces familles transnationales ?
C’était donc une chance particulière pour moi d’être invitée à cette conférence. En effet, tant l’étude des familles transnationales, que du divorce m’est encore peu connu. De plus, mon projet de thèse s’intéressant au vécu des enfants de couples ethniquement mixtes séparés qui pratiquent l’hébergement alterné en Belgique, s’inscrit dans le champ d’étude sur le transnationalisme et sur le divorce.

Retour critique sur le livre d’Iris Sportel
Lors de cette conférence, j’ai également eu la chance d’être discutante du livre d’Iris Sportel « Divorce in transnational families ». Il m’a été demandé d’en faire un résumé et de poser quelques questions à l’auteure afin de démarrer la discussion avec l’assemblée.
Dans son livre, l’auteure se centre sur le divorce des couples transnationaux hollandais-marocain et hollandais-égyptien vivant aux Pays-Bas, au Maroc et en Egypte. Plus spécifiquement, elle s’intéresse au droit familial en lien avec les expériences de vie des familles transnationales. En effet, le droit familial est très important pour ces familles, étant donné que la possibilité même de vivre ensemble dépend de la validité juridique des liens familiaux.
En interrogeant des époux de couples mixtes (époux de différentes origines ethniques) et des époux de « migration marriage » (mariage entre un migrant de deuxième génération et une personne de son pays d’origine), elle cherche à comprendre comment les époux se « débrouillent » avec les lois des différents pays avec lesquels ils interagissent dans un contexte de divorce transnational.
Iris Sportel montre que, au contraire de ce qu’elle pensait, les époux utilisent, en réalité, peu les différences qui peuvent exister entre les lois familiales des deux pays avec lesquels ils sont en interaction pour élaborer des stratégies et « tirer le meilleur parti » du divorce. Généralement, le divorce se fait juste dans le pays de résidence. En outre, dans certains cas, le droit migratoire, est quant à lui utilisé par un époux afin d’« arriver à ses fins » (par exemple, en abandonnant dans le pays d’origine son époux et ses enfants, après des vacances passées dans celui-ci, les dépouillant de leurs papiers qui leur permettaient de retourner dans le pays de résidence du couple).
Pour des questions de répartition des biens et de pension alimentaire après le divorce, Iris Sportel observe toutefois certaines stratégies opérées par les époux qui vont tenter de profiter de lois qui leur sont plus favorables dans un des deux pays.
Par ailleurs, dans le cas de la garde des enfants, les époux font peu appel à la justice pour régler la situation et ce, dans aucun des deux pays. Ils gèrent plutôt cela entre eux, en agissant en référence à un cadre normatif définissant le « bon » et le « mauvais » parent. La garde est souvent attribuée à un des deux conjoints de manière « automatique » et est vue comme allant de soi.
Dans la manière dont les époux se « débrouillent » dans un contexte de divorce transnational, l’auteure observe également le rôle important des supports sociaux mais toujours sous condition du respect de certaines normes. Par exemple, être une femme européenne victime de la malveillance d’un homme, permet davantage d’aide sociale contrairement au cas inverse. Dans d’autres cas, le capital social des individus qui divorcent d’une union mixte peut également se transformer en contrainte lorsque la famille ou les amis de ceux-ci coupent les ponts ou n’offrent pas leur aide, n’étant pas d’accord avec le mariage mixte initialement conclu.
Cette conférence m’a beaucoup appris aussi bien sur le plan théorique que sur le plan humain. J’ai pu appréhender des concepts et des enjeux théoriques et empiriques propres à ce champ de recherche. Humainement, j’y ai rencontré des chercheur-es de différents horizons et régions du monde, avec pour la plupart, beaucoup d’expérience dans la recherche. Ils m’ont livrée des conseils judicieux pour enrichir mon cadre théorique, pour aborder mon terrain et pour mener à bien ma thèse de doctorat.

Bibliographie:

Sportel I. (2016) Divorce in Transnational Families. Marriage, Migration and Family Law. Palgrave Macmillan

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Auteur:

Maryse Baar

Je suis doctorante au sein du Cirfase à l’UCLouvain. Après un bachelier en sociologie et anthropologie à l’UCLouvain, je me suis dirigée vers un master en sociologie en finalité recherche et intervention sociale. La question de la construction identitaire des enfants dans un contexte multi-local et multiculturel est un point transversal à mes recherches. Après avoir réalisé mon mémoire sur la carrière d’exil des mineurs étrangers non accompagnés en Belgique, je m’intéresse maintenant à la construction identitaire des enfants de couples mixtes séparés.